Contre-critique

"Bullet train" ou "Maria Beettle" de Kôtarô Isaka.

"Quel sentiment étrange que de se retrouver face à quelqu'un qui fait sa taille ! C'est comme s'il se regardait dans un miroir. Sauf que son reflet est plus négligé et mal dégrossi, ce qui donne à Mandarine la drôle de sensation que ses propres défauts ont pris forme humaine et l'observent avec insistance."

Dès les premiers chapitres, et même après avoir vu le film, nous ne sommes pas déçus par cette histoire de tueurs embarqués dans un train. Sur le départ du roman, on a envie de lire la suite. On découvre des dialogues savoureux, des retournements de situation palpitants, et une forte imbrication des personnages les uns avec les autres. D'un côté Kimura, qui se laisse manipuler par le Prince, de l'autre les Agrumes qui se ressemblent comme deux frères (contrairement au film) et qui s'enlisent malgré leur professionnalisme, et enfin Nanao, le poissard, celui qui croule sous la malchance depuis toujours.

"...L'Amérique s'était montrée réticente à reconnaître le déroulement d'un génocide au Rwanda. Au contraire, elle avait tenté désespérément de justifier pour quelles raisons ce n'en était pas un, ne tenant compte ni des faits ni des rapports préoccupants sur le nombre toujours croissant de victimes tutsies."

Comme on peut le lire dans l'exemple ci-dessus, l'auteur ne se limite pas à un divertissement superficiel. Il écrit aussi quelques piques acerbes sur le fonctionnement des organismes et des sociétés, ce qui est assez plaisant.

Malgré tout, l'écriture d'Isaka est assez bavarde et répétitive. Et même si on lit son récit sans effort, on aurait souhaité quelques coupes pour avancer plus directement vers les rebondissements suivants, au lieu de tergiverser comme il le fait parfois.

Au final, on s'éloigne de l'adaptation cinématographique bourrée d'action, pour se retrouver embarqué dans une histoire loufoque, dramatique et étrange, qui ménage quelques revirements intéressants.

À réserver aux amateurs.

R.P.