Contre-critique

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"Des Putains meurtrières" de R. Bolano

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"Des putains meurtrières" de Roberto Bolano.

 

"Le pêcheur met une main en visière sur le front et dit quelque chose que B ne comprend pas. Pendant un moment la tête de son père, les bras de son père qui nage vers le large disparaissent de son champ visuel. À côté du pêcheur, maintenant, il y a deux enfants. Ils regardent tous vers la mer, debout, sauf B, qui reste assis."

Voici une série de nouvelles qui se lit tranquillement, comme décrivant un quotidien banal, mais toujours l'écriture de l'auteur diffuse un drame sous jacent ou à venir, quand ce n'est pas une atmosphère aussi étrange qu'inquiétante qui nous envahit. Surtout dans les premiers textes qui nous tiennent en haleine sans qu'il y ait de véritables rebondissements.

Dans "L'oeil Silva", on découvre le périple d'un homme qui fuit le Chili et se retrouve en Inde, où il découvre de jeunes gens victimes d'un rite envers un Dieu cruel.

Dans "Gomez Palacios", un jeune homme qui donne un atelier d'écriture rencontre une curieuse directrice, et s'offre le temps d'une soirée une virée en voiture avec elle. Elle est mariée et mélancolique et, à chaque instant, un drame pourrait surgir. Mais cela ne vient pas. Comme souvent chez l'auteur, on reste à la limite du désastre, on croit qu'il va arriver, mais il ne surgit que très rarement.

Dans "Derniers crépuscules sur la Terre", c'est la même chose. B part avec son père à Acapulco. Là-bas, tous deux passent des journées tranquilles même si chacune de leurs rencontres inquiète le lecteur. Avec l'auteur, une simple baignade semble sur le point de se transformer en noyade.

La suite perd de son charme mystérieux qui devient plus banal. Heureusement, "Des putains meurtrières", la nouvelle éponyme, ravive la flamme et tranche avec le reste du recueil. Véritable exercice de style, ce texte court et insondable, narre la rencontre d'une putain avec celui qu'elle prend pour Max - ou du moins, celui qui lui sert d'intermédiaire pour s'adresser à Max ; Une vedette de la télé qui se voit pris au piège d'une femme venue le chercher à moto.

"Les femmes sont des putains meurtrières, Max, ce sont des singes transis de froid qui observent l'horizon depuis un arbre malade, ce sont des princesses qui te cherchent dans l'obscurité, en pleurant, en quête des mots qu'elles ne pourront jamais dire."

Nous avons également "Le retour", qui sort de l'ordinaire et mérite amplement la lecture, dans lequel le narrateur meurt et rencontre le couturier nécrophile Jean-Claude Villeneuve. Un texte étrange, qu'on pourrait rapprocher d'un Yoshimura.

Avec des hauts et des bas, ce recueil ne parvient pas à se hisser à la hauteur de ce que l'auteur parvient à écrire lorsqu'il est au meilleur de sa forme.

R.P.



04/12/2021
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