Contre-critique

"Les Nuits blanches

Le Sous-sol" de Fédor Dostoïevski

"Je suis un rêveur ; j'ai si peu de vie réelle que, des minutes comme celle-ci, comme maintenant, j'en compte si peu que je ne peux pas ne pas les reproduire dans mes rêves. Je rêverai de vous toute la nuit, toute la semaine, toute l'année."

Texte court, essentiellement composé de dialogues entre un homme et une jeune femme de dix-sept ans, rencontrée par hasard une nuit, "Les Nuits blanches" est une oeuvre agréable, romantique et effrénée. On s'aime dès la première rencontre, et même dès la première seconde le concernant ; on se promet des choses incroyables, on se confie pleinement à l'autre et l'on pleure. En l'espace de quatre nuits, le narrateur apprend à connaître Nastenka, sa situation, ses attentes et son amour qui devrait revenir d'ici peu.

Ce n'est pas une oeuvre mémorable mais c'est plaisant et touchant.

"La fin des fins, messieurs, est de ne rien faire du tout. L'inertie contemplative est préférable à quoi que ce soit. Ainsi donc, vive le sous-sol ! Bien que j'aie dit tantôt que j'enviais l'homme normal jusqu'à la dernière goutte de ma bile, lorsque je le vois tel qu'il est, je renonce à l'être normal..."

Dans "Le Sous-sol", le premier fragment, dans lequel le personnage central parle de lui, a peu d'intérêt. On peine à comprendre où ce quadragénaire qui vit dans un sous-sol veut en venir et son raisonnement semble bien peu philosophique, d'autant qu'il n'est pas clair et que le personnage annonce, après plus de cinquante pages, qu'il ment.

"et dès cet âge ils étaient déjà habitués à ne s'incliner que devant le succès. Tout ce qui est vrai et juste, mais abandonné et humilié, ils s'en moquaient stupidement et cruellement. Ils prisaient les grades plus que l'intelligence et à seize ans ne songeaient déjà qu'aux sinécures."

Le second fragment, intitulé "à propos de neige fondue", est déjà beaucoup plus intéressant. Il relate certains faits dans l'histoire du personnage central, comme son obsession pour une bousculade avec un officier, ou ses anciennes fréquentations avec qui il va partager un repas fâcheux. On y découvre ses réactions face à eux et sa situation désespérée, ce qui rend la lecture amusante et divertissante, malgré l'amertume du héros. Plus l'on avance dans l'intrigue, plus l'on y prend goût.

Finalement, "Le Sous-sol" est la confession d'un homme malheureux, méchant et incapable d'aimer. Et qui, dans ces vaines tentatives, ne fait qu'attiser sa souffrance et celle des autres.

À réservez aux amateurs...

R.P.