Contre-critique

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"Reste" de A.Dieudonné

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"Reste" de Adeline Dieudonné

 

"Romain était gentil, brillant, son intelligence m'érotisait, ça n'était pas réciproque. Il aimait me montrer, il aimait mes shorts courts, il aimait mon cul. Il était fier de mon cul. La lueur d'envie dans les yeux de ses potes l'égayait. J'étais son cul."

Déception, tel est le maître mot qui nous vient à l'esprit à la lecture de ce roman. Il faut dire qu'après "La vraie vie" et "Kérozène", on en attendait tellement plus de cette romancière qui avait su nous convaincre. Dans l'agglomérat de nouvelles reliées entre elles par un fil ténu qu'était "Kérozène", il y avait quelques pépites mémorables au sein d'un récit marquant malgré son inégalité. Mais alors, là, avec "Reste", la romancière nous laisse sur le bord de la route. On espérait plus d'irrévérence et de rebondissements, ainsi qu'un côté pétillant bien plus marqué, or l'histoire ronronne gentiment et devient même redondante.

Dans le chalet du parrain de son ex, une femme nous raconte sa vie récente par l'intermédiaire de deux lettres adressées à la femme de son amant mort. Alors d'une, on ne comprend pas comment Jacky a pu retrouver le personnage central dans la dernière partie du roman, et de deux, même si le postulat de départ parait glauque, il ne l'est pas. L'humour et l'ironie du sort l'emportent sur le drame lui-même, et c'est aussi ce qui fait défaut au roman. Il n'est pas assez. Pas assez drôle, pas assez impertinent, il ne nous embarque pas assez dans la folle virée de son héroïne. Sous ses dehors de folie, l'histoire demeure trop sage, trop raisonnable. Les anecdotes de la vie passée de l'héroïne sont trop quotidiennes.

"J'avançais, assourdie par les battements de mon coeur dans ma gorge, boitant sur ma cheville toujours enflée. Je suis entrée dans la bouche noire sous les arbres, essayant de voir où je posais les pieds."

On comprend très vite la situation de l'héroïne et l'on s'en lasse malgré son aspect atypique. Les quelques jours passés avec elle et M tournent en rond. L'héroïne reste avec son amant de cadavre et nous offre trop de digressions et de réflexions sur son passé, ce qui ralentit considérablement l'intrigue. Heureusement, il y a certains passages qui frôlent le fantastique, avec l'intrusion chez la Bouniane par exemple, et cela rend le récit plus oppressant et réussi.

Pour conclure, si vous ne connaissez pas la romancière, attardez-vous sur l'un de ses deux précédents écrits, celui-ci, paradoxalement à son sujet, manque cruellement de rythme et d'audace.

R.P.



05/11/2023
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