Contre-critique

"Vol de nuit" d'Antoine de Saint-Exupéry.

"Il reposait dans ce lit calme, comme dans un port, et, pour que rien n'agitât son sommeil, elle effaçait du doigt ce pli, cette ombre, cette houle, elle apaisait ce lit, comme, d'un doigt divin, la mer."

Bien plus clair que son premier roman nommé "Courrier sud", celui-ci parvient davantage que l'autre à nous embarquer dans la vie de ces aviateurs qui transportent le courrier. "Vol de nuit" nous plonge donc, une nouvelle fois, dans le quotidien des pilotes mais aussi de leur chef et des responsables du réseau entier, comme Rivière, un personnage central qui s'interroge sur sa responsabilité en cas d'incident et sur sa façon d'agir :

"Je le sauve de la peur. Ce n'est pas lui que j'attaquais, c'est, à travers lui, cette résistance qui paralyse les hommes devant l'inconnu. Si je l'écoute, si je le plains, si je prends au sérieux son aventure, il croira revenir d'un pays de mystère, et c'est du mystère seul que l'on a peur. II faut que les hommes soient descendus dans ce puits sombre, et en remontent..."

Tout aussi court que le précédent, ce roman conserve sa poésie et son écriture éthérée, mais il se fait plus discernable et moins décousu. Certains chapitres, par exemple le X, sont prenants et poétiques. On retiendra une femme désespérée, son mari (Fabien) pilote pris dans la tourmente, et un directeur intransigeant mais humain (Rivière).

Malheureusement, à part quelques belles mais trop courtes envolées, ce roman n'atteint pas les sommets escomptés.

R.P.