Contre-critique

"Heurs & malheurs du sous-majordome Minor" de Patrick deWitt.

"En vérité, la majeur partie des pièces du château était inutilisée, et d'une manière générale tout tombait en décrépitude : les meubles étaient recouverts de toiles, les lourds rideaux de velours tirés, et des monticules de poussière s'accumulaient dans les coins et les portes."

Lucien Minor est un personnage énigmatique et atypique, tout comme son surnom : Lucy. Jeune, chétif et menteur, Lucy est un être mal-aimé, rejeté par sa famille, qui se désespère que quelque chose lui arrive. Et lorsqu'on lui propose un emploi de sous-majordome au château d'un curieux baron, il y voit une occasion miraculeuse, peu importe les conditions de travail.

Sur le chemin le menant au château et durant son service, Lucy va croiser un certain nombre de personnages hétéroclites et fascinants, et il va aussi vivre des expériences insoupçonnées.

Entre récit d'initiation et rencontre avec l'étrange, ce dernier roman de Patrick deWitt réserve de belles surprises tout en frôlant avec l'absurde.

"Quelque chose avait mal tourné la nuit précédente, quelque chose que personne ne pouvait réparer. Qui pouvait dire s'il s'agissait d'un sentiment détestable de honte partagée découlant des événements de la salle de bal, ou d'une hostilité persistante s'étant emparée du groupe ?"

Ce "sous-majordome Minor" navigue entre conte horrifique, roman d'apprentissage et plaisanterie grotesque. Les personnages y sont tous plus étranges les uns que les autres et l'on ne sait jamais ce qu'il va advenir. Rappelant parfois le Dracula de Stoker et souvent le K de Kafka, le récit nous interpelle et nous subjugue. Bien entendu, l'originalité de l'histoire apporte un aspect farfelu beaucoup plus prononcé que dans le précédent et excellent "Frères Sisters", cependant le lecteur n'en sort pas déçu.

Amour contrarié, envie de meurtre, voici un roman surprenant d'un auteur qui confirme tout le bien qu'on pensait de lui.

R.P.