Contre-critique

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"La tour du Freux" de A. Leckie

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"La Tour du Freux" de Ann Leckie.

 

"C'est possible, si tu désires n'être qu'une grosse pierre sur un flanc de colline, m'a répondu la Myriade. Tu n'as pas envie de voyager ? Tu n'aimerais pas voir du nouveau ? Je crois que tu aimes méditer, te poser des questions et songer aux réponses."

Dans un style sobre et efficace, qui use de la deuxième personne du singulier et parvient habilement à ménager son suspense, Ann Leckie nous offre un début de roman teinté de médiéval fantastique. On y suit, en parallèle, l'avancée du fidèle Éolo, qui accompagne l'héritier légitime du trône nommé Mayat, et la naissance de l'Iradène, à travers la vision d'un dieu immobile. Les deux récits sont aussi intrigants qu'interconnectés, et, au départ, l'on jubile de pouvoir confondre leur intrigue respective, car ce n'est qu'après plus d'une centaine de pages que l'on commence enfin à entrevoir le mystère qui les relie.

Alors que le récit d'Éolo est ancré dans l'action, avec des personnages humains et une situation habituelle dans les romans, celui du dieu s'avère bien moins conventionnel et beaucoup plus philosophique, voire métaphysique, ce qui plaira sans doute moins au lecteur lambda.

"Et si le demandeur avait requis ma destruction ? Ou, à son insu, avait demandé quelque chose qui lui porterait tort, à lui ou à un grand nombre d'autres personnes ? L'offrande suffisait-elle pour courir un tel risque ? Toute offrande le valait-elle ? Je n'avais aucun moyen de savoir et, en conséquence, je n'ai réalisé aucune des demandes formulées..."

Pourtant, en partant d'une très bonne idée et d'une écriture et un point de vue pour le moins originales, on regrette que le texte de Leckie ne raconte au final que si peu de choses. Plus de quatre cents pages pour narrer un simple retour au pays, avec un père disparu qui est en fait retenu par le frère au sein même de la Tour où il résidait, ce n'est clairement pas assez pour tenir son spectateur en haleine de bout en bout. Dommage que le récit se révèle beaucoup trop long, et d'une manière vraiment inutile, car en divisant par deux le nombre de pages, on se serait retrouvé face à une œuvre mémorable. Alors que là, à la fin, on se dit juste : "tout ça pour ça ?!"

À réserver aux inconditionnels d'Ann Leckie.

R.P.



22/07/2021
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