Contre-critique

"Monsieur Pain" de Roberto Bolano.

"Tout à coup, comme la lune décroissante qui se penche par une trouée laissée par les nuages, la scène m'apparut sans aucun voile : deux femmes déterminées à ce qu'un pauvre homme ne meure pas avaient recours à un autre pauvre homme alors que la science et la médecine ne pouvaient ni ne voulaient rien faire."

Monsieur Pain, un quadragénaire adepte de médecine parallèle vivant à Paris, tente de sauver Vallejo, un homme mourant qui se voit pris d'un étrange hoquet. Ainsi commence ce fabuleux roman de Roberto Bolano qui n'a rien de linéaire ou de terre à terre. L'écriture se révèle envoutante et gorgée de mystère, car au détour de chaque rue, ou de chaque table, un homme pourrait épier notre héros qui, d'ailleurs, se voit pris au piège d'inquiétants rêves.

Tout est subtilement brillant dans ce roman. L'idée que le héros soit soudoyé avant même qu'il ait accompli l'acte pour lequel on le corrompt, le pub coloré dans lequel il s'installe au hasard d'une soirée et la discussion qui s'ensuit avec les deux frères fabricant de miniatures pour aquarium. On se trouve constamment à la lisière de l'onirisme et du surréel, ce qui est à la fois fascinant et dérangeant.

Bien sûr, certains vont se perdre dans l'incompréhension que suscitent certains passages, et ne pas apprécier le côté absurde de l'oeuvre, mais "Monsieur Pain" semble être un roman parfait pour découvrir son auteur qui ne manque ni d'imagination ni de talent. Un écrivain singulier à suivre absolument !

R.P.