Contre-critique

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"Térébenthine" de C. Fives

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"Térébenthine" de Carole Fives.

 

"Le dessin n'est plus au goût du jour et son enseignement a fini par disparaître du cursus des Beaux-Arts. Pour te former, tu t'inscris en cours du soir dans des ateliers municipaux, où l'on enseigne encore le modèle vivant, la nature morte et autres apprentissages jugés rétrogrades par les institutions."

Fervent défenseur du rôle des femmes dans l'art, mais aussi de la place de la peinture en tant que discipline, la romancière nous plonge avec délice dans les méandres de l'art contemporain des années 2000. Térébenthine, c'est le surnom d'un trio de personnages qui peint durant les études, dans les sous-sol de l'école, et malgré le dénigrement des autres élèves et des professeurs. Pourquoi ? Simplement parce que l'intérêt général est porté sur d'autres modes d'expression, telles la sculpture ou la vidéo.

L'écriture est moderne et aiguisée, avec son emploi impétueux du "tu" et son héroïne dont on ne connais même pas le nom. Mais c'est aussi un véritable plaisir que de suivre les pérégrinations artistiques de ces jeunes gens et qui donneront un peu de grains à moudre aux irréductibles de l'art contemporain.

La lecture de "Térébenthine" est très courte et très facile a appréhender, même s'il est certain que s'intéresser un minimum à l'art et connaître les artistes cités par la romancière ne pourra que favoriser notre immersion. Difficile, en revanche, de savoir ce que donnera la lecture du roman sur celui qui se désintéresse de l'art et ne l'a jamais étudié. Peut-être perdra-t-il une partie de l'intérêt du récit ? Dommage également que Berlinde de Bruyckere ne figure pas dans la longue liste des femmes artistes dénombrées dans le chapitre 8 de la Première année.

"Un artiste à la fin du XXe siècle ne peut pas se contenter de produire des oeuvres, il doit aussi produire leur explication. Il doit être le premier critique de son travail. Le discours compte plus que l'objet, voire le remplace."

D'un point de vue littéraire, ce n'est pas exceptionnel, mais on parvint tout de même à s'attacher aux personnages. En revanche, pour les aficionados de l'art, ce court roman sera un vrai régal. Il est engagé, dénonciateur et particulièrement rude.

De par sa brièveté, son aspect incisif et aéré, c'est, sans vouloir le dénigrer, un roman à conseiller durant l'été. On a immédiatement envie de lire un autre roman de Carole Fives, pour voir si la romancière expérimente son écriture, comme elle aurait pu expérimenter la peinture.

À découvrir !

R.P.



13/07/2023
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