Contre-critique

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"Merfer" de C. Miéville

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"Merfer" de China Miéville.

 

"La taupe plongea sous la terre compacte ou la pierre sur laquelle reposaient ces rails. La crête que laissait son passage disparut, puis vint s'élever à nouveau en tordant le sol. Son sillage était une ligne brisée."

Le jeune Sham ap Soorap, originaire d'Haldepic, a embarqué comme apprenti-médecin sur le Mèdes, un train qui fonce sur la Merfer, gigantesque étendue dépourvue d'eau mais sillonnée par l'entrelacs infini des rails qui la recouvrent. Natacha Picbaie est la capitaine taupière du Mèdes et elle traque sa philosophie, à savoir une gigantesque taupe couleur ivoire qui lui a sectionné le bras.

Évidemment le roman est clairement inspiré du "Moby Dick" de Melville. On retrouve au départ la même trame narrative mais bousculée dans un univers de science-fiction, bourré de mots valise tel Merfer et autre invention emprunte à la néologie, quant il ne détourne pas simplement l'usage d'un mot, et attribuant par exemple le terme "ange" à certains trains. Autre exemple, les protagonistes utilisent des platos pour prendre des clichés photographiques. Ainsi l'auteur créer un univers singulier et irréel peuplé de créatures modifiées et de technologie nouvelle.

Dès le début, on a du mal à entrer dans cette ambiance fouillée mais trop parasitée par des mots inutilement complexes ou singuliers. Quant aux dessins qui ponctuent les chapitres, ils sont trop enfantins et ternissent notre engouement. Pourtant les péripéties s'enchainent bien et, entre une poursuite, une exploration d'épave, la blessure d'Ankush Roch rapatrié à Bollons, le retour à Haldepic, etc, elles finissent par nous emporter.

"Le wagon de queue explosa, projeta des flammes, du métal & du bois en une grande éclaboussure, ainsi que, oh, mes Têtepierres, de petites silhouettes tournoyantes. Elles atterrirent éparpillées. & près de celles qui bougeaient encore, spasmodiquement, blessées, la terre entra en éruption : des fouisseurs carnivores..."

L'action est bien présente tout au long du roman, pourtant elle n'est pas tellement efficace, et tombe souvent à côté de ce qu'elle pourrait être. Dès le chapitre I, vous pourrez vous faire une idée des scènes d'action. La toute première, et les suivantes, ne sont ni claires ni visuellement parfaitement abouties. Peut-être est-ce dû à la traduction ? Quoi qu'il en soit, c'est fortement préjudiciable puisque l'aspect épique se voit largement diminué par le manque de fluidité de la narration.

Autre point négatif, on a du mal à imaginer cette lecture adaptée aux adolescents. Mais elle ne paraît pas non plus digne des adultes. Du coup "Merfer" a le cul entre deux chaises et peine à satisfaire pleinement.

Pourtant, bien que ("Légationville", "The city & the city", "Kraken") la plupart des romans de l'auteur ne parviennent pas à convaincre totalement, on continue de lire Miéville, espérant enfin découvrir la pépite, ce qui est plutôt méritoire pour un auteur qui s'approche constamment de l'œuvre incontournable sans jamais l'atteindre.

R.P.



10/04/2017
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